Production du Dr Miracle au Théâtre du Ranelagh à Paris en mars 2017
Les critiques sont excellentes ! Toutes les infos suivent.
Dossier de presse du Dr Miracle
Critique de la Lettre du Musicien
Critique d’Anaclase
Critique de Regard en Coulisse
Direction musicale, Françoise Tillard
Mise en scène, Renaud Boutin
Clémentine Bourgoin, Laurette
Marion Gomar, Véronique
Charles Mesrine, le Capitaine Silvio
Renaud Boutin, le Podestat
Francine Trachier, violon
Etienne Lamaison, clarinette
Françoise Tillard, piano
Bizet écrivit son Dr Miracle quand il n’avait pas encore 18 ans. Jusque là, tout lui avait souri : une enfance heureuse, des parents musiciens ou mélomanes qui ne contrarièrent en rien sa vocation, un parcours d’enfant prodige au Conservatoire de Paris… Le Dr Miracle est l’aboutissement d’un sans faute et a toute l’allégresse et la facilité de la jeunesse !
Pour un jeune compositeur au milieu du XIXe siècle, il y avait plusieurs solutions : écrire une musique facile et légère qui plaisait au public, ce qui permettait de bien gagner sa vie, ou bien poursuivre, en particulier chez les maîtres du passé et les romantiques allemands, une idée plus exigeante de la composition. Et risquer de devenir un artiste maudit, rejoignant ses compagnons des Scènes de la Vie de Bohême de Murger.
Le livret proposé par Offenbach était bien à la croisée des chemins et si Lecocq en fit une « réelle » opérette, le jeune Bizet alla chercher ailleurs son inspiration. Certes, le théâtre de la foire n’est pas loin. Certes, le comique de farce des déguisements du Dr Miracle nous rappelle Molière et sa tradition. Mais Bizet est encore plus influencé par Mozart puis Donizetti et ne cède rien à la qualité musicale et la finesse de l’écriture. Il reste en cela très classique : léger mais intransigeant…
Le livret n’est pas qu’une farce : il est tiré d’une joyeuse pièce du dramaturge irlandais Sheridan, Saint Patrick’s Day, et comme le théâtre anglais de cette époque, relève autant de la comédie de mœurs que la farce populaire. Battu et Halévy gardèrent les déguisements, les scènes de disputes, le charlatan… et ajoutèrent l’omelette censée empoisonner le père.
Rien dans la musique de Bizet n’appuie sur un comique grossier, même les répliques du charlatan ne se servent pas de procédés vulgaires. L’ouverture montre la virtuosité instrumentale du jeune compositeur d’une Symphonie en ut et la facilité de son inspiration mélodique. La suite de l’acte ne propose que peu d’arias : tout au plus une romance, genre sentimental obligé dans ces années, pour la soprano, et des couplets comiques pour le ténor. Les autres numéros sont développés et ambitieux et si on n’ose pas encore parler de « durchkomponiert », ce ne sont cependant sûrement pas des ensembles habituels dans le monde de l’opérette. Bizet connaît et admire le final du 2e acte des Nozze di Figaro ! C’est ce qui transparaît dans le trio suivant l’ouverture, puis dans le quatuor de l’Omelette. Ce souffle se retrouvera vingt ans plus tard dans son chef d’œuvre, Carmen.
La légèreté permise par le genre opérette et qui ne tourne jamais à la vulgarité sous la plume de Bizet lui permet de parodier le grand opéra, ses répétitions, la platitude de ses livrets. Le duo de la reconnaissance des deux amoureux, suivi par la découverte du pot aux roses par le père, lui permet de se moquer allègrement des poncifs du genre. C’est très réjouissant !
Cela reste un opéra comique, et les dialogues non composés (très proches de Sheridan) sont très présents dans la structure théâtrale.
Les deux Dr Miracle furent représentés 11 fois chacun au Théâtre des Bouffes parisiens à partir d’avril 1857. Les deux opérettes n’eurent que peu de succès. Cela détermina cependant la carrière de Lecocq qui en écrivit une soixantaine jusqu’en 1914. Bizet ne choisit pas cette trajectoire facile.
Les vingt années qui suivirent furent ardues. Bizet perdit toute confiance en sa facilité et traversa plusieurs crises morales. Sa musique s’en ressentit. Il oscillait entre la rigueur et l’exigence d’une vision artistique intellectuelle et la clarté qu’il admirait toujours tant chez les Italiens et surtout Mozart. Ce n’est qu’avec Carmen, opéra créé en mars 1875, qu’il trouva l’aboutissement d’aspirations qui pouvaient sembler contradictoires : une musique écrite dans ses moindres détails sans perdre une once de fluidité.
Le public ne connaît que Carmen, les difficultés de sa création et la mort brutale du compositeur épuisé. C’est avec bonheur que les auditeurs découvrent aujourd’hui Le Dr Miracle qui rassemble toutes les qualités en herbe du jeune musicien, moins le doute et la souffrance… En un mot, la jeunesse !